Une leçon de Musique en Weezic
le Business Angel Jean-Pierre Laparre nous raconte le succès de ce projet innovant
«Le développement souhaité par les BusinessAngels pour le projet n’était pas envisageable enFrance »
Créée en 2011, Weezic a réinventé la pratique musicale grâce à sa Partition Augmentée® : une partition digitale interactive et intelligente qui révolutionne l’apprentissage de la musique. Quand la startup s’adresse au réseau de Business Angels Investessor en 2013, elle a déjà remporté de nombreux prix et obtenu des subventions conséquentes, mais n’a pas encore commercialisé son produit.
L’effet Waouh
Jean-Pierre Laparre se rappelle avoir fait la connaissance de Nicolas Arbogast, co-fondateur de Weezic, lors de la présentation de son projet à l’ESCP. Pianiste amateur, le Business Angel est tout de suite conquis par le projet et invite le fondateur à déposersa candidature pour une levée de fonds auprès du 1er réseau de Business Angels de France.
Weezic ne laisse pas insensibles les Business Angels lorsque, fin 2013, les deux co-fondateurs pitchent leur projet. Après deux années de recherche et développement financées par du love-money et des prix gagnés, dont l’un du Ministère de la recherche, Nicolas Arbogast et Grégory Dell’Era ont mis au point une technologie qui répond aux frustrations de millions de musiciens en leur permettant d’apprendre la musique de manière stimulante et ludique. La Partition Augmentée® qu’ils ont mise au point est une partition dématérialisée qui tourne les pages automatiquement, joue la musique, permet d’être accompagné d’un orchestre personnalisable et analyse le jeu du musicien pour lui donner un retour, en temps réel, sur ses erreurs.
Ce projet, indubitablement innovant, séduit les Business Angels, dont un certain nombre sont musiciens amateurs, ou des amoureux de la musique, déçus par les méthodes traditionnelles d’enseignement. « C’était une pépite », fait remarquer Jean-Pierre. La startup finit d’ailleurs parmi les 4 lauréats du Grand Prix Business Angels de la Création, organisé chaque année par Investessor.
L’idée provoque un effet waouh ! Et les fondateurs sont à la recherche de fonds pour développer le catalogue de partitions financer la commercialisation leur solution.
Un trio gagnant
Jean-Pierre relève les points forts du projet : « C’était la combinaison d’une technologie innovante, d’une équipe complémentaire et du domaine de la musique, qui résonnait chez beaucoup de BusinessAngels ».
Les deux fondateurs, tous les deux musiciens, formaient en effet une équipe gagnante : diplômé de l’ESCP, Nicolas Arbogast gérait en particulier la dimension stratégique et commerciale du projet, tandis que son co-fondateur, Grégory Dell’Era, ingénieur issu de l’Ecole des Mines de Paris, en assurait notamment la partie technique.
L’entrée des BusinessAngelsau capital
La levée de fonds est formalisée au début de l’année 2014. Les fonds proviennent en majorité du réseau Investessor et de sa société d’investissement, Sibessor 2, qui réalise là l’un de ses premiers investissements. Un tiers des fonds provient de Business Angels indépendants, de Femmes Business Angels et d’ESCP BAs notamment.
« A l’époque, il s’agissait d’une levée majeure pour une startup en amorçage qui n’avait pas encore commercialisé son produit », remarque Jean-Pierre.
Au sein du Comité Stratégique, deux Business Angels représentent les nouveaux investisseurs : Jean-Pierre Laparre pour Investessor et Sibessor 2 ; Brent Taggart pour les autres investisseurs. Directeur du marketing dans un groupe britannique spécialisé dans l’enseignement numérique, Brent apporte son expertise dans le domaine du marketing numérique et de la pédagogie digitale.
La commercialisation des partitions
Quelques mois après la levée des fonds, l’équipe de Weezic dispose d’un catalogue de partitions substantiel et peut lancer sa commercialisation sur les deux fronts définis dans la stratégie du projet : le BtoC, avec la possibilité d’acheter en ligne des partitions, et le BtoB en proposant des « packs » de partitions aux conservatoires de musique.
Les efforts sont mis dans un premier temps sur l’approche BtoB qui semble requérir moins d’investissements marketing. Malheureusement, les cycles de commercialisation et de facturation auprès des conservatoires s’avèrent trop longs pour pouvoir suivre les objectifs commerciaux et financiers nécessaires au développement durable du projet.
Du côté BtoC, les investissements nécessaires à la croissance de la base utilisateurs en France s’annoncent énormes, peu rentables à court terme et donc très risqués
Fin 2014, il est clair pour l’équipe dirigeante qu’une levée de fonds conséquente est nécessaire en 2015 afin de mettre en place une stratégie commerciale cohérente tout en continuant à investir dans le catalogue, l’équipe et la technologie. Au même moment, des opportunités porteuses se présentent outre-Atlantique.
Le rêve américain
Dès l’automne 2014, les fondateurs décident d’orienter leurs démarches commerciales vers le marché éducatif aux Etats-Unis. Weezic se présente alors dans les principaux salons professionnels aux US, se positionnant comme nouvel entrant sur un marché plus mature que l’Europe, face au leader historique du secteur : Makemusic, dont le logiciel éducatif Smartmusic est déjà bien implanté au sein des écoles.
Les fondateurs se rapprochent du groupe Makemusic, dont ils avaient rencontré les équipes à l’occasion de salons professionnels en Europe. Makemusic voit immédiatement l’intérêt de Weezic, en particulier pour développer sur le web sa plateforme de pratique musicale : SmartMusic. A l’époque, le PDG de Makemusic, Gear Fisher, indiquait : « Nous nous engageons à faire grandirSmartMusicet à fournir le meilleur outil de pratique musicale du monde aux musiciens, professeurs et compositeurs ».
De son côté, Nicolas Arbogast reconnaissait que l’acquisitionse faisait« à un moment crucial de structuration du marché du logiciel d’apprentissage musical avec l’arrivée de nouvellesoffres concurrentes sur le web. Ce rapprochement va nous permettre de valoriser tous nosdéveloppements,touchant directement des centaines demilliersde musiciens utilisateurs deSmartMusic ». En apportant une expertise technologique inédite à un groupe mondial reconnu dans la pratique innovante de la musique, Weezic allait enfin pouvoir rencontrer son marché.
Une sortie de capital réussie mais un succès mitigé
En juillet 2015, la vente au groupe Makemusic est totale : les Business Angels récupèrent une plus-value significative, après seulement un an et demi dans le capital de la startup, tandis que les fondateurs valorisent leur aventure entrepreneuriale. Jean-Pierre souligne d’ailleurs les qualités de négociateur de Nicolas qui a su défendre au mieux les intérêts du projet ainsi que des personnes impliquées en France.
Par ailleurs, les deux fondateurs intègrent le groupe MakeMusic : Grégory prend la direction du Développement Produit au Colorado en étroite collaboration avec Nicolas, qui dirige la branche européenne à Paris, où l’équipe historique de Weezic continue de se développer.
Si Jean-Pierre évoque une certaine frustration chez les Business Angels, qui espéraient accompagner leur projet plus longtemps et valoriser davantage leur investissement, il reconnait que la sortie du capital s’est faite dans des conditions tout à fait favorables compte tenu des problématiques de trésorerie et de la barrière du marché français.
« Il aurait été difficile de tenter une levée de fonds en dehors des USA. Si la startup avait été américaine, il n’auraitsans doute pas été compliqué pour elle d’ytrouver des financementsde type série A. Le développementsouhaité par les BusinessAngelspour le projetn’était pas envisageable en France », conclut Jean-Pierre.
Membre du réseauInvestessordepuis 2010, Jean-Pierre Laparre a déjà investi dans une trentaine de startups. Très investi dans l’activité de l’association, Jean-Pierre en est le co-président depuis 2018. Il est également co-responsable de la SIBASibessor2.